Comment déterminer la signature d'un "Serial Bomber" ?

L'un des premiers poseurs de bombes en série identifiés aux États-Unis est probablement George Metesky, le "mad bomber" de New York.

Entre le 16 novembre 1940 et son arrestation en décembre 1956, George Metesky a terrorisé la ville de New York avec la pose de 33 bombes artisanales dont 22 explosèrent, blessant 15 personnes.

Son arrestation fut permise par le travail minutieux des enquêteurs du NYPD et la reconnaissance de certains éléments bien précis dans la conception des bombes et l'étude détaillée des différentes lettres de menaces adressées à ses victimes: Ces enquêteurs étaient parmi les premiers à reconnaître la signature d'un "serial bomber".

Qu'est-ce qu'une signature ?

Une signature est une caractéristique identifiable, identique ou similaire, dans les techniques de fabrication, l'utilisation de composants, dans le choix des cibles ou dans le mode de revendication, entre plusieurs engins explosifs, et pouvant être attribuée à une même personne.

La recherche de cette caractéristique identifiable - cette signature - s'effectue en premier lieu sur le terrain. On compte alors sur la perspicacité de l'enquêteur pour remarquer certaines similitudes entre différents événements bien distincts.

Les analyses techniques et scientifiques sur les différents engins explosés (ou non) permettent ensuite d'affiner la recherche et faire émerger une ou plusieurs caractéristiques bien singulières. C'est à ce stade qu'interviennent les travaux en laboratoire de reconstruction d'engins explosés, d'analyse de résidus d'explosifs, de recherche d'empreintes digitales et d'ADN, d'analyse des matériaux, d'étude graphologique ou encore d'examen microscopique de traces d'outils.

Il s'agit ainsi d'un véritable travail d'équipe entre enquêteurs de terrain et techniciens de police scientifiques.

L'affaire VANPAC illustre bien cette fructueuse collaboration:

Entre le 16 et le 19 décembre 1989 en Alabama, en Georgie et en Floride, quatre engins explosifs fûrent envoyés tour à tour par la poste aux domiciles de magistrats et de personnalités publiques.

Destinataire du premier colis, le juge fédéral Robert Vance fut tué sur le coup dès l'ouverture de son colis et son épouse fut grièvement blessée.

Deux jours plus tard, l'avocat Robert Robinson est quant à lui sérieusement blessé à l'ouverture d'un colis dans son bureau. Il décédera des suites de ses blessures.

Deux autres bombes seront miraculeusement interceptées et désarmorcées.

Travaillant de concert sur les différentes scènes de crimes, les enquêteurs et les techniciens en police scientifique ont pu établir une signature sur les quatre différents engins explosifs au moyen des caractéristiques suivantes :

- Les quatre bombes artisanales avaient été emballés dans des boîtes en papier, enveloppés dans du papier brun, sécurisés avec du ruban adhésif beige et une ficelle blanche, et envoyés par le service postal américain.

- Toutes étaient des "pipes bombs" contenant le même type d'explosif et étaient destinées à être déclenchées avec un type très caractéristique de détonateur improvisé.

- Ces "pipes bombs" étaient fixées dans la boîte en papier avec du fil d'aluminium, d'une manière très caractéristique.

- Des clous, du même lot, étaient utilisés comme fragmentation, fixés avec des élastiques.

- Les systèmes de mises à feu étaient identiques en termes de composants utilisés et de méthode de fonctionnement.

- Enfin, la dactylographie présente sur les quatre étiquettes postales avait été réalisée avec la même machine à écrire.

Sur la base de ces multiples examens, les enquêteurs ont pu conclure que les quatre appareils avaient été fabriqués par la même personne. Ces caractéristiques étaient si spécifiques qu’il a été conclu qu’il était impossible que plusieurs personnes aient fabriqué ces engins explosifs. Une signature venait d'être identifiée.

Grâce à une enquête approfondie multi-agences sur le terrain et à la perspicacité d'un technicien en police scientifique de l'ATF reconnaissant une signature identique à celle d'une précédente bombe artisanale associée à Walter Leroy Moody Jr. désamorcée 20 ans plus tôt, un sujet a été identifié.

Ce dernier, reconnu coupable au terme de son procès, fut condamné à quatre peines d'emprisonnement à perpétuité, à 700 ans de détention et condamné à mort pour le meurtre du juge Vance. Il a été exécuté en Alabama, par injection létale, en avril 2018.

L'identification de la signature d'un poseur de bombe joue ainsi un rôle primordial dans la résolution d'enquêtes ouvertes à la suite d'attentats multiples.

Au fil des années, de nombreux pays, dont la France, ont développé des bases de données sur ces signatures (base de données CITHARE par exemple), permettant d'améliorer leur capacité à anticiper, détecter et prévenir de futures attaques terroristes. Ce recueil de signatures contribue aujourd'hui à l'identification précoce de réseaux terroristes et à l'adoption de mesures de sécurité appropriées pour protéger la population.